J + 20 = réadaptation
Juste avant de rentrer, nous étions tristes que notre rêve s'achève mais enthousiastes de retrouver une vie plus stable. Nous pensions être prêts. Cependant, rien n'est si simple.
La première semaine a continué sur la même lancée. Chaque jour laissait place à la nouveauté. Nous avons redécouvert les lieux, rencontré à nouveau nos proches, récupéré de notre décalage horaire. Nous n'avons pas eu le temps de nous ennuyer ni de réaliser quoi que ce soit.
Bien que nous sommes maintenant SDF, le vagabondage s' est dissipé au fur et à mesure de la semaine suivante. Pourtant, nous poussons les manettes à fond pour rester dans la course. Nous prenons, par exemple, la route vers nos nouveaux projets mais ces derniers, partant dans tous les sens, finissent par nous dépasser. Nous faisons des vas et viens pour un rien. Le paysage que le soleil oubli de mettre en valeur reste statique autour de nous. Le manque du carburant commence à se faire ressentir.
Comment pourrais-je expliquer ? Lorsque l'on voyage, une sensation de liberté est constamment en nous. On va où bon nous semble, quand bon nous semble, en ne se préoccupant que de nos envies. On défile sur un nuage où les petits tracas habituels ne peuvent pas nous atteindre. On se sent vivre à 100% des expériences uniques. Et là, de retour dans notre vie, nous sentons monter la pression. Nous venons de faire un immense tour du monde mais nous tournons déjà en rond. Nous avons réalisé un rêve et la réalité nous pèse.
Alors, il faut se rendre à l'évidence. Le voyage est fini. D'ailleurs, ces derniers temps nous ne sommes pas allés plus loin que la Belgique qui n'est pourtant qu'à trois pas d'ici. Eh oui! Nous revoilà à la case départ de notre Monopoly bailleulois. Nous étions mobiles pendant 10 mois mais autour de nous, rien a véritablement bougé. Néanmoins, c'est dans cette réalité qui nous semble pour l'instant un peu monotone, que l'aventure se poursuit. Même si nous aimions notre situation auparavant, cela n'est pas si évident. Alors, nous menons le combat de la vie quotidienne à deux. Ensemble, nous parviendrons à trouver le plaisir de refaire à manger, le ménage, les paperasses et toutes ces petites choses appartenant à la société auxquelles nous avions échappés. OK, ce n'est pas gagné! A ce niveau, il s'agit plus d'une lutte entre nous pour déterminer qui va se coller à la tâche. Cependant, la situation n'est pas désespérée. Nous sommes revenus avec des atouts supplémentaires indispensables au voyage : de la patience, une faculté d'adaptation, un plein d'expériences et une réelle complicité. Et puis, après tout, même si nous nous sentons momentanément bloqués, notre esprit, lui, est libre de voyager.